Une semaine après l’agression d’Yvan Colonna en prison, la colère est montée d’un cran mercredi soir en Corse. Des manifestants ont fait irruption dans le palais de justice d’Ajaccio, où un incendie s’est déclaré. A Ajaccio et Bastia, plusieurs personnes ont été blessées dans des affrontements.
La colère gronde sur l’Ile de Beauté. Une semaine après l’attaque du militant indépendantiste Yvan Colonna en prison, des rassemblements en Corse dans la soirée du mercredi 10 mars ont été entachés d’incidents violents, dont une intrusion et l’incendie du palais de justice d’Ajaccio, et plusieurs blessés.
Depuis que le militant nationaliste, condamné pour l’assassinat du préfet Claude Érignac en 1998, est dans le coma après avoir été violemment agressé par un codétenu emprisonné pour terrorisme, les manifestations se sont multipliées sur l’île à l’appel d’étudiants, lycéens, des organisations nationalistes ou des syndicats accusant l’Etat d’une lourde responsabilité.
Mercredi soir, plusieurs centaines de personnes s’étaient rassemblées à Ajaccio ou en Haute-Corse, comme à Calvi ou Bastia. Mais très vite, des heurts éclatent entre certains manifestants et la police.
A Ajaccio, les échauffourées se sont poursuivies jusqu’à minuit et des manifestants ont fait irruption dans le palais de justice, fermé à cette heure.
Une banque attaquée à la mini-pelle à Ajaccio
Des rames de papier ou de déchets ont brûlé dans le hall et d’autres départs de feu ont noirci la façade, a constaté un photographe de l’AFP. Ces incendies ont été rapidement éteints par les pompiers.
« Il y a eu un incendie au rez-de-chaussée du tribunal, pas de propagation aux étages mais beaucoup de dégâts », a déclaré à l’AFP Jean-Jacques Peraldi, directeur des services d’incendie et de secours. Corse du Sud. Il y a eu au moins deux interpellations, selon une source policière.
Plus tard, des manifestants, équipés d’une mini-pelle mécanique, ont dégradé une agence du Crédit Agricole, avant de se diriger vers la place Claude Érignac, une place hautement symbolique, Yvan Colonna ayant été condamné pour l’assassinat du préfet de Corse.
Là, plusieurs personnes sont intervenues pour éviter tout dégât, un homme grimpant sur la pelle et criant : « Nous ne sommes pas des racailles, nous sommes des patriotes, sortez d’ici », selon un correspondant de l’AFP. Au moins 14 personnes ont été blessées, dont un journaliste de TF1 à la jambe, selon la préfecture.
La sous-préfecture visée à Calvi
A Calvi, un autre lieu institutionnel a été visé. Après un début de manifestation calme, « une quarantaine de manifestants, cagoulés, ont lancé des cocktails molotov sur la sous-préfecture et brisé des vitres à coups de pierres », a rapporté la préfecture dans un communiqué.
Dans ce contexte d’escalade, les autorités ont appelé à « l’apaisement et au dialogue afin d’éviter de nouvelles victimes ». A Bastia, 23 CRS et trois civils ont été blessés, dont un photographe du quotidien Corse-Matin, selon un bilan de la préfecture de Haute-Corse publié à l’issue de la manifestation vers 21h30.
« Les manifestants ont tiré des cocktails molotov, des bombes agricoles, des billes de fer, des frondes » et « les CRS ont maintenu la distance avec les manifestants en utilisant des gaz lacrymogènes », a détaillé la préfecture dans un communiqué.
Yvan Colonna est incarcéré à la maison centrale d’Arles, dans les Bouches-du-Rhône. Il demandait depuis longtemps à être réuni en Corse, ce qui lui était systématiquement refusé en raison d’un statut de « détenu particulièrement signalé ».
Mardi, le Premier ministre Jean Castex avait levé ce statut mais cette décision, loin d’apaiser, a été jugée beaucoup trop tardive en Corse, Yvan Colonna étant entre la vie et la mort dans un hôpital de Marseille depuis son attentat du 2 mars.
Concernant les deux autres détenus du commando d’Erignac qui appellent également à leur rapprochement sur l’île, Alain Ferrandi et Pierre Alessandri, « le Premier ministre devra trancher prochainement compte tenu des circonstances actuelles », a indiqué le porte-parole du gouvernement. , Gabriel Attal.
Certains mouvements nationalistes appellent à la poursuite de la mobilisation. Ils sont passés à l’action mercredi pour organiser une manifestation unitaire dimanche après-midi à Bastia, malgré les réticences de la famille Colonna, qui a dit craindre « un nouveau drame » dans le contexte.