Quelques jours à peine après l’annonce du prix Nobel de littérature décerné à la romancière Annie Ernaux le 6 octobre, son éditeur, Gallimard, décide sans tarder de lancer une grande campagne de réimpression de ses ouvrages, une vingtaine de romans, Armoires vides (1974) chez Young man (2022), en passant par The place (1986), Years (2008), ou encore girl memory (2016).
« Deux heures après l’annonce, on avait déjà des demandes » confie Isabelle Léger, gérante de la librairie Les mots retrouvés à Vitry-sur-Seine (Val de Marne) « D’ailleurs, comme d’habitude, ce sont les clients qui nous ont annoncé la bonne nouvelle » ajoute la libraire, ravie que le prix Nobel de littérature 2022 soit cette année décerné à une femme, et mieux encore, à une Française.
« On avait un peu de stock, heureusement, mais le lendemain de l’annonce, tout était parti », explique-t-elle. « Heureusement, vendredi à l’aube, notre représentant nous a appelés pour nous demander quelles quantités nous voulions commander. Dans ces cas-là, ils sont réactifs », poursuit le libraire.
Selon le Syndicat de la librairie française (SLF) les ventes de livres d’Annie Ernaux ont été multipliées par dix ces six derniers jours, rapporte le magazine professionnel Livres Hebdo.
Selon le dernier panel GFK communiqué à Madrigall, Le jeune homme (2022), dernier roman d’Annie Ernaux, « s’est vendu à plus de 6200 exemplaires en France la semaine du lundi 3 octobre au samedi 8 octobre, contre 665 exemplaires la semaine précédente », rapporte le Figaro.
Connu ou non, le prix Nobel de littérature voit ses ventes exploser, notait le service d’information et de statistiques de l’édition, Edistat en 2014, cité par La galerie en 2014, d’après le Nobel de Patrick Modiano.
« Nous avons tout de suite été approchés par des libraires », confie Jean-Charles Grunstein, directeur commercial de la branche littérature chez Gallimard dans un entretien au journal Le Parisien. « Nous avons immédiatement lancé des réimpressions de ses romans qui, aujourd’hui, tournent autour de 900 000 exemplaires distribués pour 85% en poche chez Folio et 15% en grand format dans nos collections Blanche, Imaginaire et Quarto », précise l’éditeur. Cette réédition sera accompagnée d’une campagne de communication, avec de nombreuses affiches et publicités.
« Avec Modiano, c’était pareil, l’explosion. Quand le Nobel n’est pas un auteur connu, on a des demandes, mais ça n’a pas du tout le même impact. Là-bas, Annie Ernaux est une auteure déjà connue, appréciée, donc c’est une excellente nouvelle pour les libraires », se réjouit Isabelle Léger.
Annie Ernaux est une écrivaine « déjà largement reconnue qui touche toutes les générations » confirme Jean-Charles Grunstein. Certains de ses livres ont déjà fait de grands best-sellers, comme The place, vendu à plus de 800 000 exemplaires. Son dernier roman, Le jeune homme s’est vendu à 100 000 exemplaires et Ans à 400 000, dont 160 000 en grand format, selon le directeur commercial de Gallimard.
Selon son éditeur, Annie Ernaux a vendu au total près de 4 millions de livres. Ce qui ne l’empêchera pas avec ce Nobel d’étendre encore sa notoriété. En France, « on peut espérer atteindre les 5 millions d’exemplaires, d’autant plus qu’un prix Nobel de littérature s’étend sur une période assez longue » avance Jean-Charles Grünstein. Mais aussi à l’étranger, où elle est déjà très appréciée et étudiée au niveau universitaire, comme aux États-Unis, à New York, où la romancière a été ovationnée quelques jours après l’annonce de son prix.
« Certains clients demandent au jeune homme, car ils ne connaissent pas son travail et veulent commencer par le dernier, mais sinon nous n’avons pas noté de demandes particulières. Nous avons commandé 20 exemplaires de chaque titre, et maintenant nous attendons les livraisons, qui ne devraient pas tarder. Il n’y aura pas de pénurie », rassure Isabelle Léger.